La cogénération
Par Richard DETENTE, jeudi 19 octobre 2006 à 15:46 :: General :: permalien #12
De nombreux liens sont également fournis pour se tenir au courant de l'évolution de la législation en vigueur pour bénéficier du statut de cogénérateur.
En lieu et place de synthèse, cette fois, je vous propose un sommaire qui vous permettra de choisir les questions relatives à la cogénération qui vous intéressent. Etant donné que le traitement de chacune de ces problématiques est court, je pense que ce sera plus lisible.
- Principe
- Fonctionnement technique
- Efficacité des cogénérations
- Observation de l'efficacité en fonctionnement d'une micro-cogénération
- Rentabilité économique des micro-cogénérations
- Bilan environnemental des micro-cogénérations
- Emission en CO2 d'une cogénération gaz naturel
-
Emission CO2 d'une solution : achat d'électricité chez EDF (donc de source nucléaire) et d'une chaudière gaz
- Conclusion du bilan écologique
Le but d’une cogénération est la production simultanée d’électricité et de chaleur. L’électricité produite sera soit consommée sur place, soit revendue sur le réseau national.
La chaleur quant à elle sera utilisée en chauffage et/ou pour le réchauffage de l'ECS (Eau Chaude Sanitaire).
Une cogénération peut également être utilisée à grande échelle dans une centrale à haut rendement produisant électricité et chaleur (cf chauffage urbain de Paris Lien direct).
On trouve aussi des micro-cogénérations (puissance électrique inférieure à 50 kWe*) et des petites cogénérations (< 1 MWe) pour l'habitat individuel ou collectif. Cette cogénération à petite échelle permet de produire une base de chaleur et d'électricité qui sera complétée par une chaudière d'appoint pour la chaleur et complétée par le réseau EDF pour l'électricité.
L'électricité produite par une installation certifiée cogénération fait l'objet d'une obligation de rachat [1] par EDF.
* kWe = On annote les mesures de puissance ou d'énergie un petit "e" pour préciser qu'il s'agit de la puissance ou de l'énergie électrique.
Dans un premier temps, on envoie du gaz, qui sera brûlé dans une installation qui produit de l'électricité (une turbine ou un moteur alimentant un alternateur, etc.). La production électrique dans la plupart des cas est vendue sur le réseau EDF après avoir était « formatée » par un transformateur (le tarif de rachat de l'électricité est plus intéressant que le tarif d'achat pour encourager la mise en place de telles installations [1]).
La chaleur dégagée par la combustion est récupérée pour chauffer un circuit d'eau qui servira ensuite à satisfaire des besoins en chauffage.
Aussi, une cogénération rencontre une double contrainte de mise en oeuvre.
D’une part, il faut produire de façon régulière pour avoir de l’électricité exploitable, mais d’autre part, tout l’intérêt d’une telle installation se fait dans les périodes de froid pour valoriser au mieux la chaleur récupérée (la production d’eau chaude sanitaire “ECS” n’étant pas suffisante en rapport de la production électrique).
Quelques chiffres sur les rendements[2] :
Dans une installation thermoélectrique standard (où l'on produit simplement de l'électricité à partir d'un combustible) on obtient classiquement des rendements [3] de l’ordre de 30% à 40%.
Pour des installations thermiques performantes (où l'on produit seulement de la chaleur à partir d'un combustible), on obtient des rendements de l’ordre de 90% (rendement sur PCI).
Pour une cogénération, il s’agit de produire de l’électricité et de valoriser la chaleur.
Dans une installation de type cogénération industrielle (grosse puissance mise à disposition pour un chauffage urbain par exemple), on obtient des rendements sur PCI, dans les conditions optimum, de l’ordre de 35% pour la production électrique, et des rendements thermiques de l’ordre de 50% soit un rendement global de 85%.
La cogénération permet donc de produire plus d'énergie avec une même quantité de combustible. On parle donc d'une économie “d'énergie primaire”. On consomme moins de combustible pour produire autant d'énergie.
On s'intéressera ici aux cas des micro-cogénérations et petites cogénérations car dans le cas des centrales les problèmes sont différents
Si l’on comprend bien qu’en hiver la production combinée (chaleur + électricité) de la cogénération sert de base, que l’on complétera avec des installations d’appoint lors des pics de froid, il se pose tout de même le problème des inter-saisons.
Comment cela se passe-t-il pour les périodes comprenant des températures variant autour de 19°C ? (Sachant que 19°C est le seuil de température en-dessous duquel on commence à chauffer un habitat).
De ce point de vue, la rentabilité des micro-cogénérations d’un pays à un autre est relative.
On se sert souvent des exemples autrichiens, suisses et allemands pour vanter ses mérites. Il est vrai que le prix de rachat de l’électricité est supérieur au prix français, ce qui permet d’avoir une meilleure rentabilité financière. Par contre cela n’est pas la seule raison de leurs succès.
Puisque ces installations ont besoin d’un fonctionnement régulier, plus l’hiver est long, plus ces équipements fonctionneront un nombre d’heures important dans des conditions optimum, où la chaleur et l'électricité sont directement valorisés. Ceci correspond aux conditions météorologiques des pays à climat continental avec une période hivernale longue et froide.
Par contre dans la moitié sud de la France plus particulièrement, les périodes d'intersaisons sont plus nombreuses. C'est à ces moments de l'année où les températures oscillent souvent autour de 19°C (température sous laquelle commence le chauffage) que l'on a du mal à valoriser une cogénération.
Soit on met en route la micro-cogénération, en courant le risque de ne pas avoir besoin de toute la chaleur, soit on la laisse à l'arrêt et on diminue son nombre d'heures de fonctionnement dans l'année.
En termes économiques, en plus des coûts de fonctionnement de la cogénération à appliquer au rendement moyen, il faut rajouter les coûts liés au système d'appoint.
Etant compris qu'une cogénération tourne à un régime constant, c'est un équipement qui assure une fourniture en base ; c'est à dire qu'au-dessus ou en-dessous de son régime de fonctionnement moyen, il faut faire appel à des équipements d'appoint plus traditionnels. Le plus souvent cette source d'énergie d'appoint est une chaudière traditionnelle de petite taille. Il y a bien un double investissement. Il convient donc d'affecter l'amortissement supplémentaire qu'elle génère au rendement global de l'installation en fonction de sa durée de vie moyenne.
En somme, l'investissement est plus élevé, donc pour que cela soit intéressant sur la durée de vie totale, il faut que les économies réalisées soient d'autant plus importantes.
Donc, si économiquement, dans certains cas, on trouve une rentabilité aux projets de cogénération, on est bien loin d'une rentabilité issue de la simple comparaison des rendements d'une solution cogénération contre une solution chaudière et achat d'électricité.
A l'instar des technologies photovoltaïques et dans la plupart des cas, les projets de micro-cogénération deviennent rentables grâce aux subventions indirectes de l'Etat au travers du prix de rachat de l'électricité sur-valorisé.
En admettant qu'une rentabilité financière soit possible avec des subventions nationales, on peut se demander ce qu'il en est du bilan environnemental (qui doit logiquement justifier ces subventions).
Il est à savoir qu'une cogénération a besoin d'un combustible de base pour fonctionner. Aujourd'hui, il s'agit principalement de gaz naturel car c'est une énergie qui a une bonne couverture du territoire urbain.
Mais on peut très bien concevoir des cogénérations qui fonctionnent aux biogaz, aux biocarburants, au fioul ou au charbon liquéfié.
Dans le cas d'une cogénération utilisant le fioul, le charbon liquéfié ou le gaz, on peut parler d'économies d'énergie, si l'on obtient un rendement global réel intéressant, mais sûrement pas d'énergies renouvelables.
Prenons le cas du fonctionnement d'une cogénération en remplacement d'une solution chaudière gaz (80% de rendement) + achat d'électricité (produite par des centrales nucléaires et centrales hydrauliques en France).
Pour 10 kWh PCI en entrée et considérant des émissions en CO2 du kWh PCI gaz naturel de 206 g, on produira en moyenne 3 kWh électriques utiles (hors problèmes de stockage), et 4 kWh de chaleur soit un total de 7 kWh utiles pour 2 060 g de CO2 émis (10 kWh PCI gaz soit 206*10 = 2 060).
Il faut préciser qu'une production moyenne de cette envergure est valable pour des installations neuves.
Pour pouvoir faire une comparaison avec la situation précédente, on partira d'un besoin final de 3 kWh électriques et 4 kWh de chaleur.
Dans le cas de notre électricité d'origine nucléaire, considérons des émissions de CO2 à 6g / kWh produits. Donc environ 20 g de CO2 pour 3 kWh d'énergie finale.
A ceci s'ajoutent les émissions liées à la production de 4 kWh de chaleur par notre chaudière traditionnelle. Soit pour un rendement de production à 80% 1 030 g (206/0,8 *4 kWh) de CO2 émis.
Au total, nous avons des émissions qui se montent à environ 1 050 g de CO2 émis pour 9 kWh PCI de combustible primaire nucléaire et 5 kWh primaire de gaz (chaudière classique) soit un total de 14 kWh d'énergie primaire pour fournir les mêmes besoins que dans la situation précedente.
Donc, si l'on considère une production d'électricité nucléaire, la solution cogénération au gaz naturel entraîne un bilan CO2 mauvais.
Mais le débat n'est pas si simple, car lorsqu'on met en marche une cogénération ce ne sont pas les centrales nucléaires qui s'arrêtent (car elles fonctionnent en base) mais les quelques centrales thermoélectriques au charbon ou au gaz qui existent encore en France.
Donc, il faut refaire le calcul comparatif des émissions avec une centrale au charbon, au gaz, etc.
Pour simplifier, prenons la valeur des émissions moyennes de CO2 de l'Union Européenne, 400 g/kWh PCI produits en pied de centrale (sachant que la France est à peu près le seul pays à faire du nucléaire, c'est un chiffre qui se rapproche de la réalité).
Nous obtenons donc 1 200 g de CO2 pour la production de 3kWh électriques utiles et nos 1 030 g de CO2 pour la production de chaleur utile par notre chaudière traditionnelle. Soit un total de 2 230 g de CO2 pour la solution centrale thermoélectrique / chaudière individuelle.
Savoir si une cogénération alimentée par des énergies fossiles est une source de réduction des émissions de CO2 est un débat complexe en France du fait de l'utilisation du nucléaire. Pour juger de l'économie d'énergie de telles installations, il faut faire des choix énergétiques (nucléaire ou gaz/charbon) qui sont à l'heure actuelle un débat de politique énergétique. De plus, comment mettre dans la balance le poids des déchets nucléaires qui polluent d'une autre façon que le CO2 ?
Si les cogénérations gaz ne sont sûrement pas « vertes », elles ne sont en tout cas pas à rejeter tant que l'on produira de l'électricité avec des centrales thermoélectriques au charbon avec des pertes en ligne désastreuses.
[1] : Les conditions de rachat sont complexes et varient régulièrement par décret, le plus simple est de se tenir au courant sur le site du ministère de l'industrie et des finances (Lien direct), dédié aux tarifs de rachat de l'électricité.
[2] : Chiffre issu du club cogénération de ATEE (lien direct)
[3] : Un rendement correspond au pourcentage de l'énergie obtenue rapporté à l'énergie fournie. Par exemple lorsqu'on alimente une chaudière avec l'équivalent de 100 kWh de gaz et qu'on obtient 85 kWh de chaleur, le rendement de la chaudière est de 85%
[4] : Source : Site de Jean Marc JANCOVICI (Lien direct) (chiffre issu de l'Ademe dans leur note de 2005 ou 2006).
Commentaires
1. Le mercredi 10 janvier 2007 à 14:51, par selma
2. Le samedi 3 février 2007 à 23:04, par moulhoud
3. Le samedi 3 février 2007 à 23:08, par tchoutchou
4. Le mardi 3 avril 2007 à 11:19, par Luong
5. Le vendredi 13 avril 2007 à 10:58, par ryom
6. Le mardi 5 juin 2007 à 17:18, par serge pavin
7. Le mardi 26 juin 2007 à 10:20, par claire
8. Le mardi 21 août 2007 à 10:44, par eymeric
9. Le lundi 8 octobre 2007 à 17:19, par Mick Burton
10. Le mercredi 10 octobre 2007 à 14:38, par Alex
11. Le mardi 30 octobre 2007 à 18:56, par fanfitz
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